L'humour fait-il peur à certains ?

Souvent, le cinéma dit "comique" est jugé avec une certaine condescendance. Il y a une sorte de mise au ban des scénaristes, réalisateurs et acteurs du genre. Il semble que pour une certaine catégorie de "cinéphiles", le comique, genre populaire, est à peine plus digne que la pornographie.

Pourtant, depuis toujours, les films humoristiques sont plébiscités par les spectateurs. Comme la majorité des français, j'aime mieux aller voir un film comique, fût-il mauvais, que l'histoire d'un homme qui déprime entre sa femme (aussi dépréssive que lui), sa maîtresse neurasténique et son fils suicidaire.

J'ai ri avec Chouchou ; j'ai aimé Bienvenue chez les Ch'tis, mais en fait, je crois que personne ne peut faire mieux que Gerard Oury en France et Charlie Chaplin ailleurs. Rire des travers de la société, c'est une façon de presenter un miroir (pas si déformant) devant chacun de nous.

Lorsque Chaplin est coincé dans les rouages géants des Temps Modernes, son discours n'est pas éloigné de celui de Fritz Lang de Metropolis selon moi.

Et bien sûr, Gérard Oury savait nous faire rire avec le racisme, le communautarisme ou la lutte des classes. Avec lui, Louis de Funès donnait le meilleur de lui-même.

A ce propos, il y a des films comiques qui ont mal vieillis : revoir la serie des Fantômas ou des Gendarmes peut devenir fatiguant, on aime les gags lorsqu'on est enfant, mais passé un certain âge, on les trouve lourds et ridicules.

Il y a aussi ces films qui font un triomphe en salles, qui deviennent "cultes", mais qui, au fur et à mesure des visionnages, font apparaître leurs défauts : c'est le cas par exemple de la franchise des Bronzés, qui ne raconte qu'une chose : les déboires d'une bande de petits-bourgeois arrivistes. Pas de quoi s'en relever la nuit !

Ces temps-ci, l'humour n'est plus aussi fin et élégant qu'il ne l'était il y a quelques décènies. Voir Jamel Debbouze se faire cracher dessus par un lama ne me fait pas rire. Les gags du film Safari avec Kad Merad ne sont pas toujours des plus légers (mais j'ai aimé l'apparition d'Omar Sy en soldat à l'accent québéquois !). Quant à Rien à déclarer, il a tenté mollement de réiterer le succès des Ch'tis. Et que dire des "humoristes" (les guillemets s'imposent) que sont Franck Dubosc, Eric et Ramzy ou pire Michaël Youn ?

Je le reconnais, en matière d'humour, je suis restée "vieux-jeu" : Coluche, pour le franc parlé, Guy Bedos, autant pour ses sketchs avec ou sans Sophie Daumier que pour ses piques politiques, Raymond Devos pour sa poésie, Robert Lamoureux, pour ses pièces de théâtre et sa trilogie de La 7ème compagnie. Tous ces braves gens ont fait du cinéma, et je prends plaisir à les voir ou les revoir, cela me change agréablement de la tendance actuelle, faite par et pour des adolescents attardés.

Bon, à me relire, je me rends compte que moi aussi je fais preuve de condescendance. Et si nous étions tous des "snobs" ?