• La Règle du jeu (1939)

    Danse sur le volcan.

    La Règle du jeu (1939)L'aviateur André Jurieux (Roland Toutain) atterrit de nuit au Bourget devant une foule en liesse après avoir traversé l'Atlantique. Mais, s'apercevant que la femme qu'il aime n'est pas présente, il laisse éclater son amertume devant le micro d'une journaliste.

    Dans une riche demeure parisienne, Christine (Nora Gregor), amante de Jurieux, écoute la radio, mais éteint très vite le poste : elle doit se rendre à une soirée avec son époux, le marquis Robert de La Chesnay (Marcel Dalio). Plus tard, celui-ci téléphone à sa maîtresse Geneviève (Mila Parély) et lui donne rendez-vous pour le lendemain ; il a en effet prévu de rompre avec elle.

    Peu de temps après, grâce à Octave (Jean Renoir), ami commun de Jurieux et Christine, l'aviateur est convié à un week-end de chasse dans l'une des propriétés du marquis. Parmi les invités figure également Geneviève...

    La Règle du jeu de Jean Renoir a la réputation d'être l'un des chefs-d'oeuvre, voir LE chef d'oeuvre du cinéma français, et j'avoue que j'étais impatiente de le voir pour me faire mon opinion. Et c'est en effet une oeuvre marquante, qu'on n'oublie pas après l'avoir vue ne serait-ce qu'une fois.

    Démarrant comme une pièce de boulevard (le mari, la femme, la maîtresse de l'un et l'amant de l'autre), elle se poursuit en accumulant les symboles, les références au théâtre classique mais surtout, surtout, elle s'intègre dans son époque troublée, cette année 1939 où tout le monde dansait sur un volcan...

    Les rappels historiques sont quasi prophétiques : ainsi, l'héroïne a des origines autrichienne, et, lors de l'arrivée de son amant dans le pavillon de chasse, elle donne le change dans un discours où elle dit en substance qu'elle fut l'inspiratrice de l'exploit de Jurieux, et que s'il avait échoué dans son entreprise, elle n'aurait pas voulu qu'on y voit "la main de l'étranger" (référence subtile à Marie-Antoinette, mais aussi à l'actualité politique de l'époque).

    Et que dire de la scène de chasse elle-même, s'attardant sur l'agonie d'un lapin, la chute d'un faisan, qui, là encore, préfigurent non seulement la guerre, mais aussi la fin tragique du film.

    La Règle du jeu (1939)

    La maîtresse (Mila Parély), le mari (Marcel Dalio), l'épouse (Nora Gregor) et l'amant (Roland Toutain) : les personnages sont en place, la comédie peut commencer...

     

    Je ne pourrais parler de La Règle du jeu sans parler bien sûr des domestiques, qui ont une place privilégiée : ainsi, Lisette (Paulette Dubost) la camériste et confidente de la marquise, son mari Schumacher (Gaston Modot), et Marceau (Julien Carette), le braconnier devenu serviteur du marquis, et qui forment à eux trois le contrepoint tragi-comique du triangle amoureux de leurs employeurs.

    La Règle du jeu (1939)Une autre scène témoigne de la relation maître-valets et de l'atmosphère du film : le repas des domestiques. Le dialogue y est d'une cruauté et d'un cynisme glaçant, démontrant qu'ils ne valent pas mieux que leurs patrons (ou que ceux-ci ne sont en fait que des "valets" ayant réussit).

    Je me suis surprise aussi à penser à une célèbre chanson de cette époque : "Tout va très bien Madame la marquise", formant un écho à ce que nous présente le film de Renoir ; ainsi, même si l'histoire est différente, le fond est le même : l'écroulement annoncé d'un monde.

    Tout est mis en oeuvre pour que, malgré le drame qui couve, on continue de s'extasier devant les marionnettes que collectionne le marquis. On a même l'impression que tous ces personnages, maîtres et valets, sont eux-même des automates qui ne dévient jamais de leur destins, de leur place dans la société,  jouant éternellement la même comédie, la même farce macabre (l'ultime scène se présente comme une pièce de théâtre, et la dernière réplique est un chef-d'oeuvre d'humour noir).

    On peut même dire que, dans une épouvantable logique, le personnage "sacrifié", issu du peuple, préfigure - et symbolise - les millions d'individus qui paieront de leur vie la frivolité et l'inconséquence des "nantis" (est-ce un hasard si parmi les invités du marquis figure un général ?).

    La Règle du jeu (1939)La Règle du jeu fut encensé par la "Nouvelle vague", aujourd'hui encore, les plus grands réalisateurs le citent parmi leurs sources d'inspiration. Je dirais simplement que c'est l'un de ces films à voir absolument au moins une fois dans sa vie.

    La Règle du jeu (1939)

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    On s'amuse, on flirte...

     

    ... alors que le drame se noue...

     

     

     

     

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  • Commentaires

    1
    Daniel
    Mardi 13 Juin 2017 à 16:52

    Chef d oeuvre du cinéma français mais surtout chef d oeuvre tout court qui fait partie intégrante de la grande histoire du cinéma mondial .En terme de cinéma français on a toujours tendance à négliger des films qui ont fait le tour du monde et inspiré tant et tant de réalisateurs Outre Atlantique notamment .  Quelquefois il est bon de le signaler , le cinéma d' avant  les années 50 ( et un peu les années 60 ) comporte  un nombre impressionnant de films français copiés et recopiés ailleurs ...Ensuite on avait les acteurs...et moins les grands scénaristes pour , avec le temps, ne plus avoir ni les uns ni les autres !

      • Mardi 13 Juin 2017 à 18:26

        Je crois bien que c'est pour cela que j'aime ce genre de "vieux cinéma" : des histoires intelligentes, des acteurs charismatiques, et souvent - comme ici - une certaine vision désabusée du monde.

        Bien entendu, tous les films des années 30, 40 ou 50 ne sont pas des chefs-d'oeuvre mais la plupart ont un petit "quelque chose" qui me les rend intéressants. Ne serait-ce que les acteurs et les réalisateurs...

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