• Le chemin de fer transcontinental.

    Un lien d'acier entre l'Est et l'Ouest.

    Le chemin de fer transcontinental.L'Amérique au 19ème Siècle est un pays en construction, bouillonnant, divisé. Mais c'est aussi un pays qui espère, qui n'hésite pas à faire appel à la technologie pour aller plus vite, plus loin dans son rêve, quitte à vendre son âme...

    Pendant longtemps, les esprits frileux estiment que La Frontière est dangereuse, peu propice à la civilisation et peuplée d'Indiens hostiles. Mais en 1833, le trappeur Joe Walker rallie la Californie à cheval, ouvrant ainsi la première route transcontinentale du pays.

    En 1844, un riche marchand new yorkais, Asa Whitney, fait une étonnante proposition au Congrès : si les pouvoirs publics lui vendent 31 millions d'hectares (à 38 cent l'hectare), il se charge de les revendre afin d'investir dans la construction d'une voie ferrée transcontinentale ! S'il obtient le soutien de 17 États, le Congrès rejette son idée, refusant que les terres soient la propriété d'une seule personne.

    Le chemin de fer transcontinental.Mais sa proposition va attirer la curiosité de certains investisseurs vis-à-vis de la Frontière : le sénateur Benton va ainsi envoyer des équipes pour relever la topographie des territoires de l'Ouest, demeurés inexplorés depuis l'expédition Lewis et Clark.

    Son projet de voie ferrée est présenté devant le Sénat en 1849 et ses arguments sont suffisamment convaincants pour qu'une première loi foncière en faveur des chemins de fer soit votée en 1850. Ladite loi autorise l'État à aider les compagnies ferroviaires en leur cédant des terrains, ce qui va attirer les hommes d'affaires et les politiciens, les uns à l'affut de bons investissements, les autres cherchant à faire de leurs localités des noeuds ferroviaires.

    Le secrétaire d'État à la guerre, Jefferson Davis, reçoit du gouvernement 150 000 $ pour faire effectuer des relevés topographiques des possibles voies d'accès au Pacifique. Quatre équipes sont envoyées en prospection durant l'été 1853, et en janvier de l'année suivante, c'est la "Piste du Sud" qui est choisie. Seulement, elle traverse une partie du Mexique, et la guerre américano-mexicaine vient juste de débuter. Le projet du sénateur Benton est abandonné.

    Le chemin de fer transcontinental.C'est alors qu'entre en scène l'ingénieur Theodore Dehone Judah qui travaille pour la Sacramento Railroad. Il se rend à Washington en 1856 pour tenter de convaincre les politiques de relancer le projet de ligne transcontinentale et, effectivement, le sénateur Curtis appuie son idée. Mais voici qu'éclate la Guerre de Sécession...

    D'une certaine manière, le conflit va être d'une grande aide pour la mise en chantier du chemin de fer transcontinental : en effet, Abraham Lincoln va y voir le moyen de couper l'approvisionnement des États confédérés tout en s'affranchissant de la dépendance du Nord vis-à-vis du Sud pour l'acheminement de certaines matières premières. Le Pacific Railway Act est signé en 1862, et la mise en chantier est confiée à deux compagnies de chemin de fer, la Pacific Railroad à l'Ouest et l'Union Pacific à l'Est.

    La Pacific Railroad est gérée par quatre hommes d'affaires, qui seront surnommés les "Big Four" ou "The Associates" : Collis P. Huntington, Leland Stanford, Mark Hopkins et Charles Cooker. L'Union Pacific est quant à elle dirigée par le général Dodge et le bien nommé George Francis Train.

    Le chemin de fer transcontinental.

     

    Les travaux débutent en 1863 et la ligne reliera Sacramento (Californie) à Omaha (Nebraska). Dans un premier temps, les ouvriers travaillant à l'Ouest sont intéressés par la perspective d'un salaire qu'ils cumulent pour participer à la ruée vers l'or de Californie. Mais dès qu'ils arrivent à un pécule suffisant pour se lancer dans l'orpaillage, ils quittent le chantier. L'entreprise arrive ainsi très vite au bord de la faillite, d'autant plus qu'à l'Est les navires de guerre confédérés s'attaquent en priorité aux bateaux approvisionnant les chantiers.

    Le chemin de fer transcontinental.Mais au printemps 1854, des milliers de Chinois fuyant la famine de leur pays débarquent à San Francisco. Plus efficaces et meilleur marché que les gens du cru (ils reçoivent un salaire inférieur à celui des Blancs et doivent construire leurs propres abris) ils sauvent l'entreprise, au point que des démarcheurs iront jusqu'en Chine pour recruter : en 1868, les "coolies" chinois représentent les 2/3 des ouvriers.

    La Guerre de Sécession terminée, le congrès américain propose des lots de terre en plus d'un salaire pour les ouvriers. Des immigrés Irlandais, des esclaves affranchis et des Mormons, tentés par l'offre, viennent ainsi renforcer la main-d'oeuvre chinoise.

    Mais les nouveaux ouvriers, arrivés à la Frontière, gaspillent allégrement leur paie dans les saloon et les bordels, ou bien meurent dans des rixes ou des accidents survenus sur le chantier. Sans oublier les irrégularités du terrain (montagnes, fleuves) qui poussent les ingénieurs à toujours revoir leurs plans.

    Un autre problème récurrent est celui des Indiens, qui voient d'un mauvais oeil l'arrivée du "Cheval de fer" sur leur  territoire. Les compagnies engagent alors des tireurs d'élite, dont la principale activité consiste à abattre les bisons pour acculer les autochtones à la famine. Le plus célèbre d'entre eux sera bien sûr "Buffalo Bill" Cody.

    Le chemin de fer transcontinental.Le 10 mai 1869, la jonction entre les deux tronçons de la voie est faite à Promontory Summit (Utah), et le chemin de fer transcontinental est prêt à fonctionner. S'étendant au final sur 3 000 km, il va accélérer le peuplement de la côte ouest, qui passe de 150 000 à 4 millions d'habitants, changeant irrémédiablement la situation économique et démographique des États-Unis.

    Mais en 1872 éclate l'affaire du Credit Mobilier of America : créée par Train, vice-président de l'Union Pacific, cette société qui gérait la sous-traitance du chantier est accusée d'avoir versé des pots-de-vins à des sénateurs et d'avoir gonflé des factures afin d'enrichir les actionnaires. Le scandale éclabousse le gouvernement et pousse l'Union Pacific à la banqureroute.

    Un scandale similaire touche la Pacific Railroad l'année suivante, mais un incendie détruit les comptes de la compagnie et aucune malversation ne peut être prouvée à son encontre.

    Cela n'empêche pas le chemin de fer transcontinental de fonctionner, et peu à peu, les longues files de "wagons" en direction de la Frontière se font de plus en plus rares, tandis que des villes situées sur la ligne se spécialisent dans le transport de bétail en direction de l'Est, provoquant ainsi la disparition du cowboy.

    Avant l'avènement de l'automobile et de l'avion, le train est donc devenu pour les américains un mode de déplacement rapide, sûr et pratique pour traverser le pays.

    Aujourd'hui, plusieurs centaines de kilomètres de l'ancienne voie ferrée sont encore utilisés, notamment dans la Sierra Nevada. La compagnie ferroviaire Antrak propose une liaison quotidienne entre Emeryville dans la baie de San Francisco et Chicago. Appelée la California Zephyr, elle emprunte le tracé originel du transcontinental sur une portion allant de Sacramento à Winnemucca (Nevada).

    Bilan :

    Le chemin de fer transcontinental américain fut la première grande voie ferroviaire de l'Histoire, et d'autres pays (la Russie et l'Afrique du Sud notamment), devant le résultat impressionnant, se mirent en devoir de se doter eux aussi d'une telle innovation.

    Le chantier dura 6 ans en tout et pour tout, couta la vie à 2 000 hommes sur les 20 000 employés, et enrichi de nombreux hommes d'affaire. Mais il occasionna aussi l'un des premiers scandales financiers du pays qui sera à l'origine de la crise financière américaine de 1873 qui durera cinq ans.

    Le 8 mai 1999, un monument à la mémoire des milliers de travailleurs chinois fut inauguré le long de la Highway 174 à Cape Horn en Californie.

    Le chemin de fer transcontinental.Le cinéma étant né à la même époque que les premières lignes de chemin de fer, il n'est pas étonnant que ces deux inventions se rencontrent : si l'on pense bien sûr à la fameuse bande L'Arrivée en gare du train de la Ciotat des frères Lumière, il faut savoir que le tout premier film de fiction tourné en Amérique (un western !) fut L'Attaque du Grand Rapide, où des bandits investissent un train.

    Mais concernant l'aventure du transcontinental, deux films sont à retenir :

    - Le Cheval de fer (1926) de John Ford, avec George O'Brien et Madge Bellamy

    - Pacific Express (1939) de Cecil B. DeMille, avec Barbara Stanwyck et Joel McCrea.

     

    Côté BD, l'album de Lucky Luke "Des rails sur la prairie", qui évoque lui-aussi la construction de la ligne transcontinentale, marque l'arrivée de René Gosciny comme scénariste des aventures du cowboy. C'est également l'apparition de la fameuse vignette de fin dans laquelle le héros s'éloigne dans le soleil couchant en fredonnant  "I'm a poor lonesone cowboy".

     

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